PAGE SÈCHE et ENCRE SYMPATHIQUE

Balourd 10, que ne rebute pas l'emploi de l'encre sympathique, n'entretient pas pour autant la phobie de la page blanche. (Une encre sympathique devient invisible en séch

vendredi 31 janvier 2020

Les Dépossédés du Vieux-Hull : récit poétique


Pierre Raphaël Pelletier,
Les Dépossédés du Vieux-Hull :
récit poétique,
Ottawa, Les Éditions David,
coll. « Indociles », 2020, 144 p.
17,95$
ISBN 978-2-89597-726-1


Pierre Raphaël Pelletier nous raconte son Vieux-Hull. Petites vies au raz de l'asphalte et du ciment des trottoirs ; c'est l'Île-de-Hull d'autrefois, avec la rue Principale (promenade du Portage) et ses commerces courus pour artère et le parc de la Gatineau comme poumon lointain. C'est le Vieux-Hull d'un poète qui remonte jusqu'à ses années d'enfance.

« La rue Principale / avec le coin qu'on préfère qui ramène à l'essentiel / la rue à portée de la main / la rue à portée de l'humain (p. 135). »
« Vous baignez dans ce décor / enfants insouciants / d’une époque rassurante (p. 16). »

C’est aussi l’histoire d’un quartier populaire, d’un quartier ouvrier. Entre 1969-1975, 1600 maisons sont démolies, 6000 familles sont expropriées de façon cavalière pour faire place aux édifices fédéraux et provinciaux. Les Dépossédés du Vieux-Hull remémorent le drame des gagne-petit arrachés à leur cadre de vie, aux liens familiaux et sociaux qui tissaient la trame de leur existence. Le Vieux-Hull a été saccagé, ce qu'on ne pouvait exproprier - l'église Notre-Dame, l'hôtel de ville - a opportunément disparu en fumée.

Magouilles financières et tripotages politiques l’ont emporté ; l'omerta clouait les lèvres. Protestations et contestations n’ont rien changé à l’affaire. Benoît, le frère poète de l'auteur, gardera longtemps les séquelles d'un coup de matraque constabulaire...

Pierre Raphaël a la bonne inspiration de ramener à plusieurs reprises notre attention sur le destin de ses proches. Je ne détaille pas ici le compte des bons et mauvais jours, des plaisirs et des deuils, des projets et des désillusions. On trouve là les pages les plus attachantes du livre, les plus riches en humanité. La texture même de la vie nous y est révélée.

Passent l’ombre de personnages marquants, Marcel Chaput, Mgr Charbonneau ou celle du peintre Jean Dallaire. Celles, plus anonymes, du « Club des poètes maudits »…

Les Dépossédés nous offrent ainsi une triple biographie ; celle de l'auteur, de sa famille et du Vieux-Hull. Le texte est scandé par plusieurs poèmes qui redisent la prose d’une façon plus lyrique et plus personnelle.

De courts chapitres donnent un rythme enlevant à la lecture. On espère des jours meilleurs, on attend le retour du printemps, « celui qui reste pour de bon/qui sourit amusé d’être là (p. 101). »

Mais quel printemps espérer pour le Vieux-Hull défunt ?

« Mon Vieux-Hull date de 1900. Au-delà des mots et de lancinantes étrangetés, liées entre elles par des forces funestes, d’autres feux d’origine suspecte illuminent les cieux du centre-ville de Hull lors de sa destruction au tournant des années 1970. Résonnent de sourdes complaintes dans les rues des quartiers ouvriers qui ont échappé au carnage. Ainsi a-t-on détruit ma ville natale, et l’on continue, encore aujourd’hui, à vouloir mettre fin à d’autres quartiers patrimoniaux, au profit de tours à condos luxueuses et... gourmandes. Il va sans dire que j’ai été témoin — comme tant d’autres — de la barbarie qui s’est abattue sur le Vieux-Hull. À la lumière de tout ceci, j’ai écrit ce court récit poétique pour rappeler les moments heureux et malheureux de mon enfance, de mon adolescence et la fin de ma jeunesse, vécues dans ce qu’on appelle maintenant l’Île de Hull. J’espère que ce récit, écrit au fil de la mémoire d’un enfant d’alors et d’un écrivain d’ensuite, avec les inexactitudes qu’engendrent les souvenirs nourris de fantasmes choyés dans la fiction, saura vous émouvoir... et vous faire retrouver le passage vers votre propre enfance (Les Dépossédés du Vieux-Hull, p. 13-14). »

Henri Lessard, 31 janv. 2020


* * *


Né à Hull, du côté québécois de la rivière des Outaouais, Pierre Raphaël Pelletier a passé la plus grande partie de sa vie du côté ontarien, où il a milité dans de nombreux organismes artistiques et culturels francophones. Menant une double carrière d’artiste visuel et d’écrivain, il a réalisé plus d’une trentaine d’expositions, solos ou en groupe, et publié une vingtaine de livres. (Paragraphe biographique extrait du site des Éditions David.)

vendredi 24 janvier 2020

Y’a toujours pas de souci !




Michèle Bourgon lance à Gatineau son dernier né, Y’a toujours pas de souci !


(Ce texte est repris dans le blogue de Michèle Bourgon, « Les humeurs de la mère Michèle ».)

Résumé

Dans Y’a pas de souci ! (tome I), Michèle Bourgon décrivait ses aventures à Vauvert, en Petite-Camargue et à Vézelay, en Bourgogne, suite à des invitations en résidences d’auteure.

Dans le nouvel ouvrage, Y’a toujours pas de souci ! (tome II), Michèle emploie le même ton humoristique pour décrire sa résidence d’auteure à Caen, en Normandie.


Lancement


Gatineau, Maison du Citoyen, dimanche 26 janvier 2020 à 14 h : https://leshumeursdelameremichele.wordpress.com/2020/01/15/gatineau-ottawa-ya-toujours-pas-de-souci/



Mon avis critique


Comment visiter la France, revoir sa Normandie, loger dans un atelier d'artiste, donner une conférence sur les Filles du roy (vous savez, les nanas de Louis XIV, qui en avait à revendre), survivre à l'invasion par les toits d'un commando composé d'un seul homme et revenir saine et sauve au Québec ?

Outre la peur des araignées (je ne fournis pas de photo pour épargner la sensibilité de Michèle), l’auteure, accompagnée de ses comparses, Danièle et Isis, sans oublier Clito, leur voiture de location, en arrive à se méfier des douanes, des réservations d'hôtel, des heures d'ouverture (ou de fermeture) des restaurants, des navettes, des autoroutes (qu'il faut emprunter) et des stationnements (où il faut bien s’arrêter).


Comment faire le plein en France ? Comment fonctionne une buanderie, pardon, une laverie en Normandie ? La France et le Québec ont beau être dans le même hémisphère (Nord), un océan les sépare (l’Atlantique).

Tout au long des pages, les anecdotes savoureuses défilent à un rythme enlevant. Michèle apprend à faire contre mauvaise fortune, bonne... ventilation !

« Mon innocence est ma forteresse !», affirme Michèle, à bout de ressources. (C'est pas vrai, c'est le marquis de Montcalm qui a dit ça, mais je trouve que ça lui irait bien, à Michèle, comme devise.)

Mais ne prenons pas tout au tragique. Y’a toujours pas de souci ! abonde en rencontres agréables ; il fonctionne un peu comme un guide touristique, truffé de descriptions et d'aperçus historiques, mais rédigé avec humeur, humour et amour de la France. Le ton est enjoué, et je ne suis pas sûr que Michèle s’emploie réellement à nous faire pleurer sur son sort. On a plutôt envie de rire avec elle. Michèle ne s'épargne pas et de tous les êtres qu'elle rencontre, c’est elle qu'elle épingle le plus.

Professeure à la retraite, Michèle a un œil attendri sur les falaises blanches d'Étretat : combien de tableaux pourrait-on couvrir avec cette masse de craie ?

Certains renseignements pourront être utiles à ceux qui seraient assez téméraires pour risquer quand même une expédition en France. (J'exagère, le ton général est tout à fait sympathique.)

Y’a toujours pas de souci ! : récit humoristique d'un séjour en Normandie.




mardi 21 janvier 2020

Je suis de bon conseil


Première règle : en cas de doute, hésiter.

Seconde règle : ne jamais donner de conseil à quelqu'un qui hésite, ça nourrit ses doutes.

lundi 20 janvier 2020

Repos de l'égo


À ces noces où je ne connaissais personne, j'étais curieusement délivré de la nécessité d'être moi. On est toujours son propre infatigable représentant.

dimanche 19 janvier 2020

Acceptation tacite (suite)


On vient au monde, on apprend à marcher et à parler. Tout le reste découle de ces premières initiatives irréfléchies.

samedi 18 janvier 2020

Acceptation tacite


Je ne me souviens pas avoir coché la case « J'accepte les conditions » avant de naître.

jeudi 2 janvier 2020

Dit-elle


Dit-elle ou les dits de ma voisine : compilation

Lecture silencieuse
J’aime lire, dit-elle. Ça ne fait pas de bruit. Rien que le frottement des pages. Un « slurp » de temps à autre (gorgée de café). L’air du temps, limpide, comme il l’est toujours, mais on ne s’en rend jamais compte. Si le cerveau avait des gargouillis – digestion de lectures ou macération d’idées noires ; tu imagines, au restaurant ou dans l’autobus, un gargouillis cérébral d’appétit sexuel !

Propriété
– Les gens n'appartiennent à personne..., dit-elle.
– Dommage, il y en a qu'on aimerait rapporter à leur propriétaire..., dis-je.

En toute franchise
– La dernière personne avec qui j'ai été franche était vraiment la dernière des personnes.

Parenthèses
(Après, je suis d’une compétence rare. Pendant, c’est une autre paire de manches, les choses ne deviennent évidentes qu’ensuite, quand les faits se métamorphosent en événements historiques. Pour l’information continue, je suis zéro, je n’excelle qu’en récits de jadis et de naguère, en faits revisités, synthèses et analyses après-coup. J’ai l’esprit de l’escalier – et mon escalier est bâti en colimaçon, ce qui explique le léger tournis qui affecte mon esprit et qui, parfois, propulse mes propos dans une déconcertante trajectoire spiralée.)

Poire
– Quand on parle de couper la poire en deux, dit-elle, je me sens toujours visée.